7e Dimanche de Luc

Synaxe de l’Archistratège Michel et des autres Puissances incorporelles :
Gabriel, Raphaël, Uriel, Jegudiel, Salathiel et Barachiel

Textes liturgiques

Tropaire, ton 5 dimanche, la Résurrection

Fidèles, chantons et adorons, / le Verbe sans commencement comme le Père et l’Esprit, / né de la Vierge pour notre salut, / car Il a bien voulu dans sa chair monter sur la Croix / pour y endurer la mort // et relever les morts par sa glorieuse résurrection.

Tropaire, ton 4 Archistratèges

Ô chefs des puissances célestes, Michel et Gabriel, / nous vous prions sans cesse, indignes que nous sommes : / par vos prières couvrez-nous de l’ombre des ailes de votre gloire immatérielle / pour nous sauvegarder, nous qui nous prosternons devant vous avec ferveur et vous clamons : // délivrez-nous de tout danger, vous qui êtes les chefs des puissances d’en haut.

Kondakion, ton 5 dimanche, la Résurrection

Tu es descendu aux enfers, ô mon Sauveur, / Tu as brisé leurs portes, Toi le Tout-puissant, / et avec Toi Tu as ressuscité les morts, ô Créateur ; / Tu as brisé l’aiguillon de la mort / et Adam a été délivré de la malédiction, ô Ami des hommes. // Aussi Te clamons-nous : Seigneur, sauve-nous.

Gloire…

Kondakion, ton 2 Archistratèges

Archanges de Dieu, Michel et Gabriel, / serviteurs de la gloire divine, / princes des anges et guides des hommes, / demandez à Dieu ce qui nous est utile / et la grande miséricorde, // car vous êtes les chefs des incorporels.

Et maintenant…

Kondakion, ton 6 la Mère de Dieu

Protectrice assurée des chrétiens, / médiatrice sans défaillance devant le Créateur, / ne dédaigne pas les supplications des pécheurs, / mais dans ta bonté empresse-toi de nous secourir, / nous qui te clamons avec foi : / sois prompte dans ton intercession et empressée dans ta prière, // ô Mère de Dieu, qui protèges toujours ceux qui t’honorent.

Les lectures du jour

Lecture de l’épître du saint apôtre Paul aux Galates (du jour) (Ga VI,11-18)

Frères, voyez avec quelles grandes lettres je vous ai écrit de ma propre main. Tous ceux qui veulent se rendre agréables selon la chair vous contraignent à vous faire circoncire, uniquement afin de n’être pas persécutés pour la croix de Christ. Car les circoncis eux-mêmes n’observent point la loi ; mais ils veulent que vous soyez circoncis, pour se glorifier dans votre chair. Pour ce qui me concerne, loin de moi la pensée de me glorifier d’autre chose que de la croix de notre Seigneur Jésus Christ, par qui le monde est crucifié pour moi, comme je le suis pour le monde ! Car ce n’est rien que d’être circoncis ou incirconcis ; ce qui est quelque chose, c’est d’être une nouvelle créature. Paix et miséricorde sur tous ceux qui suivront cette règle, et sur l’Israël de Dieu ! Que personne désormais ne me fasse de la peine, car je porte sur mon corps les marques de Jésus. Frères, que la grâce de notre Seigneur Jésus Christ soit avec votre esprit ! Amen ! 

Lecture de l’Évangile selon Saint Luc (Lc.VIII, 41-56)

Et voici qu’arriva un homme du nom de Jaïre ; il était chef de la synagogue. Tombant aux pieds de Jésus, il le suppliait de venir dans sa maison, parce qu’il avait une fille unique, d’environ douze ans, qui était mourante. Pendant que Jésus s’y rendait, les gens le serraient à l’étouffer. Il y avait là une femme qui souffrait d’hémorragie depuis douze ans ; elle avait dépensé tout son avoir en médecins, et aucun n’avait pu la guérir. Elle s’approcha par-derrière, toucha la frange de son vêtement et, à l’instant même, son hémorragie s’arrêta. Jésus demanda : « Qui est celui qui m’a touché ? » Comme tous s’en défendaient, Pierre dit : « Maître, ce sont les gens qui te serrent et te pressent. » Mais Jésus dit : « Quelqu’un m’a touché ; j’ai bien senti qu’une force était sortie de moi. » Voyant qu’elle n’avait pu passer inaperçue, la femme vint en tremblant se jeter à ses pieds ; elle raconta devant tout le peuple pour quel motif elle l’avait touché, et comment elle avait été guérie à l’instant même. Alors il lui dit : « Ma fille, ta foi t’a sauvée. Va en paix. » Il parlait encore quand arriva de chez le chef de synagogue quelqu’un qui dit : « Ta fille est morte. N’ennuie plus le maître. » Mais Jésus, qui avait entendu, dit à Jaïre : « Sois sans crainte ; crois seulement, et elle sera sauvée. » A son arrivée à la maison, il ne laissa entrer avec lui que Pierre, Jean et Jacques, avec le père et la mère de l’enfant. Tous pleuraient et se lamentaient sur elle. Jésus dit : « Ne pleurez pas ; elle n’est pas morte, elle dort. » Et ils se moquaient de lui, car ils savaient qu’elle était morte. Mais lui, prenant sa main, l’appela : « Mon enfant, réveille-toi. » Son esprit revint, et elle se leva à l’instant même. Et il enjoignit de lui donner à manger. Ses parents furent bouleversés ; et il leur ordonna de ne dire à personne ce qui était arrivé.


Homélie sur le septième dimanche de Luc

Nous sommes au début de la vie publique du Seigneur : Il vient de rentrer du pays de Gerasa où Il a délivré un redoutable possédé et Il rentre  à la maison, c’est-à-dire à Capharnaüm. La foule des galiléens, qui sont en admiration devant ce qu’Il fait et dit, L’attend. Il se passe alors un évènement surprenant puisqu’il s’agit en fait de deux évènements concomitants, imbriqués l’un dans l’autre, qui concernent tous deux des femmes, une vieille dame et une fillette, et qui ont trait aux deux conséquences principales du péché de l’Homme, à savoir la maladie et la mort. Outre le fait que le Christ accomplisse deux grands miracles presque simultanément, le rapprochement des deux évènements comporte en lui-même un enseignement théologique remarquable. Les trois synoptiques le rapportent (Mt 9, 18-25, qui est moins précis, et Mc 5, 21-43).

Il y a d’abord un drame familial, une fillette d’environ 12 ans est en train de mourir et son père vient se prosterner devant Jésus pour Le supplier de venir dans sa maison. St Matthieu et St Marc disent :  pour lui imposer les mains afin qu’elle soit sauvée et vive. Cet homme n’est pas n’importe qui : il s’agit de Jaïre, chef de la synagogue de Capharnaüm1, c’est-à-dire de celui qui gère ce lieu saint, là même où le rabbi Ieshouah est venu enseigner et où Il a délivré un possédé (Lc.4, 33-37) et probablement guéri l’homme à la main desséchée (Lc.6, 6-11). Cette fillette mourante symbolise l’humanité déchue qui est demeurée dans l’enfance, incapable de parvenir à la maturité en raison de la semence de mort qui est en elle. Et ceux qui sont autour sont impuissants à la sauver : l’Homme sans Dieu est impuissant.

Le Seigneur s’y rend sur le champ. Il faut noter la disponibilité, la compassion et la compréhension du Christ vis-à-vis des gens, de l’humanité souffrante. Ceux qui viendront à Sa suite, ne lui ressembleront pas toujours… Mais la foule Le presse tant qu’Il a du mal à avancer. Et ce retard est important pour la suite de l’histoire. La première conséquence, totalement imprévisible, est qu’une autre malade va essayer de profiter de la situation pour obtenir sa guérison. Là il s’agit d’une femme adulte, qui souffre d’une hémorragie permanente2. Comme elle en souffre depuis 12 ans, on peut conjecturer qu’elle soit âgée (dans l’Antiquité on était vieux à 40 ans). Sa maladie est aussi un enseignement spirituel : la perte de sang signifie la perte de la vie et donc la perte de l’Esprit, comme cela est dit dans l’Ancien Testament3. Aussitôt après la chute de l’Homme et son exclusion du Jardin d’Eden, Eve a engendré ses enfants dans la souffrance et avec perte de sang (le placenta), puis Caïn a tué Abel, dont le sang s’est répandu sur la Terre4. La première conséquence – tragique – du péché de l’Homme est la perte du Saint-Esprit, et donc la perte de la vie. Cette vieille femme malade représente l’autre aspect symbolique du péché : l’humanité est vieillie par le péché, enlaidie, sans force, malade.

Ces deux femmes symbolisent le péché dans son antinomie : l’humanité est simultanément restée dans l’enfance – inaccomplie – et vieillie – impuissante et enlaidie. Le Christ ressuscitera à 33 ans, ce qui est exactement le contraire, ou plutôt l’antidote, car à 33 ans on est encore dans la « force de l’âge » tout en ayant acquis de la maturité. C’est l’âge parfait et éternel de l’Homme régénéré et renouvelé.

L’hémoroïsse est âgée et gravement malade, mais elle a une intuition spirituelle remarquable. Elle se dit : ce rabbi est tellement extraordinaire que, si j’arrive à toucher, ne serait-ce que les franges de Son vêtement, je serai guérie. Elle se montre une digne fille de Moïse : les franges symbolisaient le ruissellement de la grâce qui vient d’en haut et qui descend jusqu’à la Terre. C’est le Christ Lui-même qui, par le Saint-Esprit, avait prescrit à Moïse de mettre des franges au bas des vêtements des juifs pieux5. Elle s’approche par derrière, pour ne pas être vue, et touche les franges de la tunique du Messie : elle est guérie instantanément. Le Christ nous donne alors un enseignement théologique capital. Il dit :  Qui M’a touché ? Les Apôtres sont décontenancés, interloqués, et Pierre Lui fait remarquer : Tu as vu la foule qui Te presse, comment peux-Tu demander cela ? Mais le Seigneur insiste : ce n’est pas la foule : quelqu’un M’a touché, car J’ai connu qu’une force était sortie de Moi. La force qui est sortie de Lui, ce sont les énergies divines incréées, qui sont « un aspect » de la nature divine, différentes de l’essence inconnaissable de Dieu, énergies dans lesquelles Dieu crée et Se révèle. Mais ces énergies ne sont en aucune façon une « émanation naturelle » de la divinité : elles sont totalement conscientes. Le Christ est parfaitement conscient qu’une force est sortie de Lui : l’Esprit-Saint a transmis cette énergie qui sort du Christ à cette femme en raison de sa foi ; mais le Christ en est entièrement conscient (comme l’Esprit d’ailleurs). Les énergies divines ne sont pas une partie de Dieu : Dieu est entièrement présent dans Ses énergies. Nous pourrions plutôt dire qu’elles sont une modalité de l’Être divin, un « acte libre de Dieu » qui donne Sa grâce6. Ce sont ces énergies qui déifient l’Homme7.

Le Christ arrive enfin à la maison de Jaïre. Mais la fillette est morte. Ce qui semble être un malheur va se transformer en un grand bonheur pour toute l’humanité : heureusement pour nous que le Christ ne fût pas là !(comme Il l’a dit Lui-même à propos de Lazare). On dit alors au père de ne plus importuner le Maître, mais le Christ balaye cela et dit à Jaïre : Ne crains pas : crois seulement et elle sera sauvée . Je ne suis pas seulement le médecin des malades, Je suis Celui qui donne la vie, qui ressuscite les morts. Le Christ fait éloigner la foule bruyante et en larmes. Il entre dans la maison seulement avec les parents et la triade apostolique (Pierre, Jacques et Jean) en tant que témoins. Mais juste avant d’entrer, Il dit à l’attention de la foule cette parole étonnante, qu’Il redira lors de la résurrection de Lazare :  Elle n’est pas morte, mais elle dort8, ce qui suscite des moqueries.

Il est vrai que le sommeil est un symbole de la mort, puisqu’on perd la conscience. Mais ce n’est pas ici le vrai sens. Le Seigneur veut dire ceci : dans la mesure où Moi, le Créateur du Ciel et de la Terre, Je suis ici présent dans cette maison, la mort de cette fillette n’est qu’un sommeil, car Je suis le Maître de la vie et de la mort et, d’un mot, Je peux la réveiller, la relever de la mort. C’est ce que le Seigneur fait aussitôt. Il la saisit par la main et dit : enfant lève-toi (dans les textes grec et latin le terme est : « ressuscite »9. On retrouve ce geste du Seigneur dans l’icône de la Résurrection, où Il tire Adam et Eve de l’abîme de l’Enfer éternel. La fillette est ressuscitée et Il la rend à ses parents.

Dans l’Evangile, il y a cette belle expression : Et son esprit revint en elle et elle se leva . Lorsque l’âme de l’homme revient dans son corps, le corps reprend vie et l’Homme retrouve son intégrité : il redevient corps et âme vivants. Mais ce miracle n’est possible que par la venue du Saint-Esprit. C’est Lui qui est la résurrection des morts. Voilà pourquoi, probablement, le Seigneur utilise le terme esprit et non « âme »10: il s’agit de l’âme spiritualisée par la présence du Saint-Esprit.

P. Noël TANAZACQ, Paris

Notes :

1. Les ruines de cette synagogue sont toujours visibles. J’y suis allé en pèlerinage en 1988.

2. Il s’agit d’hémorroïdes graves, avec un suintement permanent ; c’était extrêmement handicapant et on ne savait pas les soigner.

3. L’âme de la chair est dans le sang (Lév. 17, 11) : Toute personne ayant une perte de sang est légalement impure (Lév. 15, 25-27). L’hémorroïsse n’avait donc pas le droit de se mêler à la foule, d’où son comportement discret et craintif.

4. C’est pour laver ce péché-prototype que le Sang du Christ coulera de la Croix jusqu’en terre.

5. Aux 4 coins de leurs manteaux (Nb 15, 38). C’est pour cela que les aubes des prêtres en Orient (le sticharion) ont des franges, de même que les étoles (épitrachiles) et les palliums (omophores).

6. Jean Meyendorff : Saint Grégoire Palamas, 1959, p. 45.

7. St Grégoire de Nysse (+394) puis St Maxime le Confesseur (580 – 666) en avaient parlé en filigrane, mais c’est surtout St Grégoire Palamas (1296-1359) qui a explicité et formulé la doctrine orthodoxe, notamment lors des deux conciles de 1341 et 1351.

8. Lazare dort, Jean 11, 11.

9. Grec : egeïrou. Latin : surge , de surgere qui donne surrexit (= elle se leva). St Marc, qui était le secrétaire de Pierre, mentionne la parole exacte du Seigneur en araméen : Talitha koum.

10. Grec : pneuma et latin : spiritus. Alors qu’Il utilise souvent le terme « âme » dans l’Evangile (grec : psychê ; latin : anima).

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